La France méprise-t-elle ses artistes hip-hop ?
Jean-Marie Pottier
Sciences Humaines N° 327 - Juillet 2020
La France a-t-elle un problème avec son genre musical le plus populaire chez les jeunes ? C’est la thèse que défend le Guardian à partir de deux actualités récentes : la quasi-absence d’artistes hip-hop parmi les nommés aux Victoires de la musique et l’annonce par le Snep, le syndicat des industriels du disque, que la « surexposition du répertoire rap, hip-hop et R&B » dans les meilleures ventes était en voie d’être « corrigée ». Contrairement à ses homologues américain ou britannique, le Snep a arrêté de comptabiliser dans les ventes les écoutes « gratuites » (rémunérées par la pub) en streaming, qui dopent la popularité des artistes hip-hop. Et ce alors qu’en janvier dernier, le média spécialisé DJBooth sacrait Paris première ville hip-hop du monde, avec plus de 2,6 millions d’albums vendus en 2019 par ses artistes… Un contraste qui, pour le quotidien britannique, marque le fait que le rap français constitue « la bande-son d’une crise d’identité nationale » dans un pays marqué par des « divisions raciales amères ». Voilà qui vient à tout le moins confirmer l’intérêt des études sur le hip-hop français, cette « contre-culture juvénile et banlieusarde » – selon les mots de la sociologue Pauline Clech – qui est devenue aujourd’hui un genre musical dominant.
Michael Oliver, « “You're not welcome” : rap's racial divide in France », The Guardian, 22 avril 2020.
Pauline Clech, « Mobilités sociales et rapports au pouvoir institutionnel : une élite du hip-hop en banlieue rouge », Politix, n° 114, 2016/2.
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